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Souvenirs de Thierry Sobezyk et d'Asylum Party



Le décès de Thierry Sobezyk, bassiste et co-chanteur d'Asylum Party à l'âge de 57 ans le 11 juillet 2019 a été annoncé sur les réseaux sociaux avec tristesse et émotion par ses anciens acolytes de Little Nemo, Mary Goes Round et Babel 17. Ayant connu Thierry, je voulais évoquer son souvenir ci-dessous et mettre à disposition quelques documents sur Asylum Party.

Thierry était avec Philippe Planchon un des deux fondateurs et auteur-compositeur d'Asylum Party. Leur histoire a été très bien écrite par David Sanson dans le livret des rééditions de l'intégrale du groupe sur le label Infrasition en 2006. Sa présentation peut être lue ici.

A l'origine guitariste, Thierry était passé à la basse quand le groupe auquel son ami d'enfance Philippe Planchon participait avait été réduit à leur duo. Nécessité faisant foi, une boite à rythme compléta le duo et Asylum Party était né. Thierry avait toujours conservé une approche originale de ce instrument et y insufflait sous une sonorité héritée de ses modèles Peter Hook et Jean-Jacques Burnel son héritage plus classiquement rock ou pop (des Beatles bien sûr au rock comme Tom Petty, Blue Oyster Cult, Motorhead, sans oublier la new wave découverte au départ avec Police, XTC, Men At Work, Magazine puis Joy Division et The Cure). Ce son très caractéristique apparait dès les premières démos (regroupés sous le titre d'Univers Clos) ainsi que le goût pour les solos atypiques enchevêtrés avec la guitare (The wind will blow, Le voyage immobile..).

Son style a traversé les décennies puisque non seulement Asylum Party est le groupe de la Touching Pop dont on trouve le plus de reprises par des groupes récent du monde entier sur Internet (avec Borderline comme album culte de référence) mais en plus ses parties de basse sont décortiquées, rejouées et mises en ligne. Il était une référence pour de nombreux musiciens et ses propres commentaires sous leurs vidéos sur You Tube montrent à quel point il était touché par cet hommage et l'admiration d'un public plus international et rajeuni par rapport à celui de l'épopée Lumesque.


Un rare témoignage audiovisuel d'Asylum Party en concert (le son est celui d'un autre concert, d'où le décalage)

 

Thierry était capable sur scène d'une grande aisance dans son jeu et son interprétation (dont une trace audiovisuelle inespérée est apparue sur You Tube), et aussi dans sa recherche de communication avec le public, avec un côté débonnaire qui contrastait avec la musique sombre du groupe. Il était également très abordable après les concerts. C'est ainsi que j'ai pu le rencontrer après un concert en 1991 à la Cité Universitaire d'Antony (concert avec la performance en direct d'un plasticien qui avait peint un visage humain géant sur scène pendant la durée du concert, l'ombre des musiciens se projetant démésurément agrandie sur la toile de fond comme dans un film expressionniste des années 30). Il était en dehors de la scène également sympathique et plein d'humour.


Il avait apporté une touche plus légère et pop au deuxième album "Mère", dont le thème le touchait pourtant directement puisque sa mère était morte quand il avait douze ans. Outre cet héritage anglo-saxon, il avait un amour de la chanson française, admirateur d'Alain Bashung et capable de coup de coeur pour certains morceaux comme "Ainsi soit-il" de Louis Chédid (dont il fit une reprise très personnelle, tout comme il avait le projet de reprendre "Les marionnettes" de Christophe).

C'est naturellement qu'il avait écrit et enregistré après la fin d'Asylum Party un album solo quasiment tout en français, enregistré en 1992 au studio Val d'Orge avec Jean Taxis (producteur et ingénieur du son également de Little Nemo). Cet album, "Voyeur", aurait dû sortir sur le label Single KO mais sa faillite entraina la fin de ce projet.Thierry l'avait récemment publié en intégralité sur You Tube, permettant aux esprits ouverts et curieux de découvrir cette oeuvre personnelle, sans doute la plus apaisée et heureuse qu'il ait enregistrée (Album écoutable dans cette playlist).


Thierry à la guitare
Thierry à la guitare acoustique (Photo Fushia)
Le monde du business de la musique étant impitoyable et peu accueillant pour les personnalités comme la sienne, il ne publia rien ensuite mais continua après cette période à composer, parfois en collaboration (dont le projet Mandala avec Jean Franceschi de Babel 17) et à enregistrer des morceaux. Il était également fan de cinéma et littérature (notamment Jim Harrison, Hubert Selby Jr...), comme le jeu de mot "Vingt mille feux sous les nerfs" et la référence au "Matin des Magiciens" de "La Tourmente" peuvent en donner des indices... Il avait d'ailleurs été sélectionné comme auditeur membre du jury du Livre de la Radio France Inter en 2014.

Thierry à la basse avec Mary Goes Round (source Jérôme Avril)


Il avait écrit avec Olivier Champeau le "Tribes are meeting" de Teepee, titre sur lequel on reconnait instantanément ses choeurs graves sur le refrain fina
l suivi de sa basse typique. Il avait tenu la guitare basse dans la formation live de Mary Goes Round après le split d'Asylum Party.

Récemment, il avait publié sur You Tube deux reprises hommages à ses anciens complices de la Touching Pop, dans des versions soit proche de l'original (New Flood de Little Nemo mais avec solo de guitare rock-blues) soit tranposée musicalement (l'épique new wave du "Promised Land" de Mary Goes Round ralenti en une version blues nonchalante très attachante). Sa disparition laisse malheureusement ces cartes postales musicales sans suite.


Nos pensées vont à sa femme et ses deux fils, sa famille, ses amis et notamment Philippe et Pascale d'Asylum Party...

"Le rêve sans fin, le show doit continuer..."
(Le rêve sans fin, extrait de son album solo "Voyeur" de 1992)
 
Articles sur Asylum Party


Une présentation dans Best en 1988 pour la sortie de "Picture one"




Une interview pour le fanzine Ad Vitam Aeternam en 1989, juste après l'arrivée de Pascale Macé et avant l'enregistrement de Borderline





Une interview pour l'éphémère magazine rock "Worst" à l'occasion de la sortie de "Mère".